Né en 1940, Marvel Jenkins est un garçon tout ce qu'il y a de plus normal. Niveau scolaire moyen, force moyenne, niveau de vie moyen, apparence banale, passe-temps banals, amis banals. Bref, sa vie n'a rien de spectaculaire. Après avoir faillit être renvoyé du lycée pour avoir violenté un collégien...
...il entre à l'université de physique la moins chère du pays. Là, il slalome entre petits boulot et concerts gratuits pour jouer avec ses amis tout en payant ses études.
Rien ne pouvait présager qu'à 22 ans, il deviendrait immortel. En rentrant du resto où il faisait la plonge, il entendit de pas derrière lui. En se retournant, il vit une femme qui marchait dans sa direction. Mais il y avait plein d'endroits dans sa direction, y compris le parking où il avait garé sa voiture. Donc il n'y fit pas attention. Quand il arriva devant son taudis sur roues, il passa dix bonnes minutes à chercher ses clés. Rien à faire, elles avaient disparu.
« C'est ça que tu cherches ? »
Il se retourna. C'était la femme de tout à l'heure. Il n'avait d'abord pas fait attention mais, vue de près, elle était très belle. Ses longs cheveux noirs contrastaient avec la blancheur de sa peau. Et ses yeux... Il n'arrivait pas à voir la couleur de ses yeux. C'était sûrement à cause de l'obscurité mais il avait l'impression qu'ils passaient sans cesse du marron au rouge. Ce qui était complètement ridicule, personne n'a les yeux rouges ! L'étrangère lui tendit ses clés mais les lui arracha des mains lorsqu'il les effleura. Et elle... ELLE LES BROYA ! Dans sa main ! D'accord, un trousseau de clés n'est pas non plus indestructible mais, même en forçant, il n'arrivait pas à les tordre d'une seule main ! Les morceaux de métal difformes tombèrent sur le sol, le bruit de la chute ponctuant le rire de la brune. Là, il commençait à avoir peur. Cette fille n'était pas normale. Et comme il n'était pas particulièrement courageux, sa peur se voyait clairement. Il commença à reculer, doucement, comme on le fait quand on est devant un animal sauvage. Sauf que ce n'était pas un animal qu'il avait devant lui mais bien un être humain. Du moins en partie.
« Pourquoi rentrer tout de suite ?
-Euh... Je-je... Je dois rentrer chez moi, il est tard et...
-Tu auras tout ton temps après. Tu en auras même trop.
-...
-Je suis une chercheuse de tête. Je dois trouver des personnes assez jeunes et qui n'ont rien à perdre. Des gens qui ne vont pas passer un siècle à se morfondre à cause de la perte de leur famille, de leur vie. Et tu correspond parfaitement au profil, Marvel.
-Quel profil ? Et comment connaissez-vous mon nom ? S'il vous plaît, je ne peux plus rentrer en voiture, il faut que je prenne le dernier bus, il est presque l'heure...
-Mais puisque je te dis que tu n'es pas pressé ! Décompresse ! Il vaut mieux être détendu, ça fait moins mal. »
D'accord. Avant, il avait peur. Là, c'était la panique totale. La jeune femme s'approcha encore. Oui, ses yeux passaient bien du brun au rouge. Puis elle sourit. Ses dents d'une blancheur extrême répondaient à l'une de ses questions : elle n'était pas humaine. Ses incisives si longues, si pointues, ses yeux rouges, sa force... Il avait un problème et si elle était bien ce qu'il pensait, ce problème n'avait pas de solution. Elle allait le tuer. Boire tout son sang et disparaître au lever du soleil comme dans les films. Enfin, si les films étaient vrais ce qui n'était pas sûr du tout.
« Dis adieu au monde des vivants. »
Il ne la vit pas bouger, mais la douleur dans son cou était bien assez explicite. Ce fut d'abord comme une petite brûlure. Puis le venin le glaça de l'intérieur. Il ne pouvait plus bouger, son corps ne répondait plus. Puis la femme le lâcha. Il tomba sur le sol, les yeux grands ouverts. Il ne voulait pas crier, donc il se mordait la lèvre. Il ne voulait pas que tous les clients rappliquent et qu'elle les tues comme elle... Mais il n'était pas mort ! Elle ne l'avait pas tué ?! Alors elle l'avait... Transformé ? Oui, ce devait être ça. Les vampyrs pouvaient réellement créer d'autres vampyrs en les mordant. Et ça faisait tout aussi mal qu'au cinéma. Il sentait le venin qui partait de son cou pour aller dans tout son corps. C'était d'ailleurs la seule chose qu'il sentait. Il ne voyait rien, ne pouvait pas parler, n'entendais qu'on horrible bourdonnement qui devenait de plus en plus douloureux et s'il n'avait pas su qu'il était couché sur du béton, il aurait cru être immergé dans l'océan Arctique. Puis la torture cessa. Il sentit un goût étrange dans sa bouche. Portant la main à ses lèvres, il la redécouvrit pleine de sang. Se mordre les lèvres n'avait pas été une très bonne idée. Ses dents était maintenant tout aussi acérées que celle de la jeune femme. Et il avait la gorge en feu. Il courut à la salle de bain pour boire un coup... La salle de bain ?! Mais où était-il ?
« Tu es enfin réveillé !
-Je... *il toussa* Je suis où ?
-Chez moi. Je n'allais pas te laisser à le vue de tout le monde ! Et puis, le soleil t'aurais brûlé.
-Le soleil ? Ça fait combien de temps que je suis comme ça ?
-Une semaine. Enfin, ça fera une semaine dans deux heures.
-Une semaine ?! J'ai raté le boulot pendant UNE SEMAINE ! Je vais me faire renvoyer, je vais me faire renvoyer...
-Et c'est ça qui te préoccupe ? Tu est un vampyr maintenant, tu ne peux plus travailler là-bas. Pas avant d'avoir appris à te contrôler.
-Je me sens très bien, merci. Je n'ai pas envie de tuer la Terre entière pour assouvir ma soif, de l'eau ira très bien.
-Viens dehors avec moi. »
Et ce fut à ce moment que tout bascula. Dehors, les odeurs des humains et autres créatures l'assaillirent. La douleur à sa gorge était telle qu'il tomba à Terre pendant un moment. Il faisait nuit, tant mieux. Il repéra l'odeur la plus proche et fonça. Ce jour là, ses victimes furent innombrables. Il ne pouvait pas du tout se contrôler. Dès qu'il voyait quelqu'un, il tuait. Et quand le soleil se leva, il ferma les yeux. Le lendemain, il était à nouveau chez la vampyr. Elle lui expliqua que d'autres races vivaient dans ce monde, qu'ils étaient actuellement à New York, et que tout le monde le croyait tué par une bête sauvage car elle avait laissé un peu de son sang et sa veste déchirée près du restaurant. Pendant quarante ans, ils fonctionnèrent ainsi : Ils chassaient la nuit, elle lui apprenait tout sur les vampyrs le jour. Mais jamais elle ne lui parla des bijoux en rubis. Quand un autre vampyr lui apprit qu'ils protégeaient du soleil, il entra dans une colère noire.
« Pendant tout ce temps, tu ne m'as RIEN DIT ! J'aurais pu éviter toutes les fois où le soleil m'a brûlé ! Tu n'as pas idée de la douleur qu'on ressent quand sa peau semble s'enflammer !
-C'était pour ton bien ! Tu ne sais pas encore te contrôler, tu aurais tué des humains en plein jour, devant tant d'autres ! Notre race doit rester un mythe aux yeux des hommes !
-J'aurais pu me contrôler. J'aurais pu ne pas sortir la journée. J'aurais pu me nourrir discrètement. Et dire que c'était pour m'aider... Tu voulais me contrôler, oui ! Depuis le début, je t'obéis aveuglément. Tu penses que je ne sais pas me contrôler ? Tu as raison. Je ne suis qu'un tueur. Je vois pas pourquoi on devrait tuer ensemble, c'est tout aussi bien en solitaire. J'dégage ! »
« Oh, et si tu n'avais pas remarqué, le truc à mon cou, c'est du rubis. Je l'ai acheté en rentrant. »
Il a parcouru le monde jusqu'en 2001 où il est revenu à New York, le 11 septembre. L'avion dans lequel il avait embarqué clandestinement s'est écrasé. Désolé, le pilote s'était coupé, l'odeur était trop enivrante. Depuis, il a trouvé un job de barman dans une boîte de nuit où il gagne assez pour renouveler sa garde-robe en fonction de la mode du moment. Et aussi parce que les tâches de sang ne partent pas bien en machine ^^'.
Il ne cherche pas à se contrôler plus que ça. De toute façon, il a encore l'excuse d'être "un nouveau-né". Les vampyrs chargés de l'ordre parmi leur race laissent tranquilles les immortels de moins de 100 ans d'expérience. Et puis, il se laisse rarement dépasser par ses instincts. Le jour, il reste le plus souvent enfermé pour éviter qu'une impulsion le pousse à boire devant trop de témoins. Le soir, il drague et tue la fille une fois chez elle. Cela lui assure un repas par jour, voire plus si la victime habite avec d'autres personnes. C'est toujours plus efficaces que de frapper à la porte d'inconnus.
Parfois, quelqu'un se blesse dans la boîte. Il fait alors mine de l'aider pour la tuer dès que personne ne les vois. Son travaille a quelques inconvénients : il se fait parfois des amis. C'est assez dérangeant sachant qu'il ne pourra pas faire autrement que de les tuer s'il laissent tomber ne serait-ce qu'une goutte de sang sur son plan de travail. Enfin, au bout de 50 ans d'immortalité, on s'habitue à perdre ses amis.